quinta-feira, 12 de março de 2009

Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Le bilan d'un siècle (1801-1900)

1900

Exposition universelle internationale

de

1900

à Paris.

Le bilan d'un siècle

(1801-1900)

par M. Alfred Picard

Tome premier. Education et enseignement. - Lettres. - Sciences. - Arts

pags. 458 - 474

Publicado em 1907

2. Photographie. - Nicéphore Niepce aborda en 1813 le probléme de la photographie et le résolut en 1823 Sur une plaque d'argent bruni, il étendait du bitume de Judée dissous dans l’huile de lavande. La plaque ainsi préparée était, soit placée dans une chambre noire en face de l’objet à photographier, soit recouverte, par exemple, d'une gravure à reproduire et exposée au soleil. Sous l'action plus ou moins enérgique des rayons lumineux qui la frappaient directement ou qui traversaient le papier de la gravure, le bitume devenait plus ou moins insoluble dans les essences. Un lavage à l'huile de lavande additionnée d'huile de pétrole blanche enlevait le bitume suivant sa plus ou moins grande solubilité et donnait une image positive ou une réserve susceptible d'être gravée. Ainsi Niepce avait trouvé la chambre noire, la production de l'image latente, le développemenL de cette image et l'héliogravure.

Daguerre, inventeur du diorama, s'associa à Niepce en 1829. L'usage de la chambre obscure lui avait inspiré le désir de fixer les images fugitives qui se forment dans cet appareil. Malheureusement, Niepce mourut en 1833. Six ans plus tard, le daguerreotype était rendu public par un remarquable rapport de Francois Arago à l'Académie des sciences. Le procédé consistait à soumettre une lame d'argent ou de plaqué d'argent aux vapeurs d'iode dans l'obscurité, à y provoquer ainsi le dépôt d'une mince couche d'iodure d'argent, à la placer pendant quelques minutes dans la chambre noire ou elle s'impressionnait, à l'exposer ensuite hors de l'action du jour aux vapeurs mercurielles qui se portaient et se condensaient sur les parties infiuencées par la lumiere, à y développer ainsi une image se dessinant en clair, enfin à dissoudre l'excès d'iode par l'hyposulfite de soude. Ce procédé donnait une épreuve positive extremement fine. Le Gouvernement français s'en rendit propriétaire; des rentes viagères furent allouées, l'une de 6,000 francs à Daguerre, l'autre de 4,000 francs aux héritiers de Nicéphore Niepce.

L'image daguerrienne présentait cependant des défauts: lenteur de l'impression, altérabilité du cliché au moindre frottement, renversement comme dans toutes les images de la chambre noire, unité de l'épreuve, miroitement, enfin noircissement par les gaz sulfurés de l'atmosphère. Divers savants s'efforcèrent d'y remédier. Claudet, en Angleterre, et Foucault, en France, associèrent le brome à l’iode, accrurent de la sorte la sensibilité, réduisirent la pose á quelques secondes et arrivèrent même à l'instantanéité. D'autre part, Foucault et Fizeau consolidèrent l’image en couvrant la plaque d'une faible solution d'hyposulfite double d'or et de sodium, puis en la chauffant par-dessous; les parties noires prenaient en même temps de la vigueur et l’épreuve était virée. L'image fut redressée à l'aide d'un prisme ou d'une glace placée devant l'objectif; mais alors la durée de la pose subissait une augmentation.

Dès avant la publication du procédé de Daguerre, Bayard avait obtenu directement à la chambre noire des épreuves positives sur papier. Il préparait ce papier au chlorure et à l'azotate d'argent, le mettait en pleine lumière jusqu'à complet noircissement, le lavait et le recouvrait d'une solulion d'iodure de potassium, qui renversait la sensibilité. La feuille, impressionnée dans la chambre noire, laissait apparaître l'image grace à la décomposition de l'iodure de potassium par les rayons lumineux et à la formation d'un iodure jaune clair d'argent. Plus tard, sans changer le principe de sa méthode, Bayard passa de la production d'une image directe au développement d'une image latente.

Un chimiste anglais, Talbot , poursuivant des recherches parallèles à celles de Niepce, Daguerre et Bayard, créa les images négatives sur papier. Sa méthode, dite calotype, était assez compliquée. La feuille de papier recevait d'abord une solution d'iodure d'argent dans l'iodure de potassium; puis elle subissait un séchage et un lavage, et, Se trouvait ainsi recouverte d'un précipité très fin d'iodure d'argent, insensible. Après dessiccation, Talbot sensibilisait la surface par une solution de nitrate d'argent additionné d'acide acétique et d'acide gallique, l’impressionnait et développait avec le même mélange. Une fois l’épreuve négative obtenue, il tirait des épreuves positives en plaçant sous la première feuille calotype des feuilles analogues et en soumettant le tout à la lumière. Baldus, Blanquart-Evrard, Legray perfectionnèrent le procédé de Talbot; Legray, notamment, imagina le papier ciré pour négatifs, ce qui permit d'avoir des papiers sensibles secs se conservant deux jours et davantage.

Malgré les améliorations réalisées, le grain du papier empêchait les finesses désirables pour les portraits et surtout pour les positifs da petites dimensions. En 1848, Niepce de Saint-Victor, neveu de Nicéphore Niepce, remplaca le papier du cliché négatif par le verre, qui offrait l'avantage d'une transparence parfaite. II préparait la couche sensible en répandant sur la plaque de l'albumine iodurée, puis en la plongeant dans un bain de nitrate d'argent additionné d'acide acétique. L’agent revelateur etait l'acide gallique ou le protosulfate de fer.

La lenteur de l'impression lumineuse et la dificulté d'avoir une couche d'albumine de pureté sufisante conduisirent les anglais Archer et Fry à recourir au collodion, idée déjà émise par Legray. Il y eut le procédé au collodion humide et le procédé au collodion sec.

Dans le procédé humide, on commençait par étendre sur le support du collodion additionné d'un iodure et d'un bromure alcalins; après évaporation de l'alcool et de l'éther, la couche encore spongieuse couvrant le verre était sensibilisée par une solution de nitrate d'argent, qui donnait naissance à de l'iodure et à du bromure d'argent; employée avant séchage, la plaque recevait l'impression lumineuse, qu'on développait aussitôt avec du sulfate de protoxyde de fer ou de l'acide pyrogallique mélangés d'acide acétique; enfin on fixait l’image négative, au moyen d'une solution d'hyposulfite de soude ou de cyanure de potassium, on lavait le cliché, on le séchait et on le vernissait afin de le protéger contre le frottement.

Au procédé du collodion humide, dificile à employer hors de l’atelier, se joignit le procédé du collodion sec. Coinme le collodion tendait, en séchant, à perdre sa porosité et aà devenir impénétrable aux réactifs de développement, différents moyens furent imaginés pour y pourvoir, spécialement par Taupenot (collodion albuminé) et par le major Russel (procédé au tanin).

Une variante du procédé au collodion humide, creée par Ad. Martin, donnait des épreuves positives directes, dites ferrotypes.

Poitevin inventa la photographie au charbon. Au cours de ses recherches pour l'amélioration de l'héliogravure, il avait constaté qu'un mélange de bichromate de potasse et de corps organiques gommeux ou mucilagineux, exposé à la lumière, devenait plus ou moins insoluble, par suite de la réduction partielle de l'acide chromique.

Partant de là, il opérait de deux façons pour produire des images positives au charbon. Dans l'une de ces méthodes, le papier était recouvert d'un mélange de bichromate de potasse et de gélatine ou d'albumine; après l'avoir soumis à la lumière sous un cliché négatif, on y appliquait au tampon de l'encre grasse et on procédait à un lavage. Dans la seconde méthode, la couche sensible était formée du même mélange avec addition de charbon, ce qui évitait l'opération de l'encrage. Le charbon pouvait du reste être remplacé par une autre substance colorante.

Ultérieurement, Poitevin, qui a rendu tant de services à la photographie et qui fut lauréat d'un grand concours ouvert par le duc Albert de Luynes, découvrit une troisième méthode, ayant pour origine la propriété des mélanges de perchlorure de fer et d'acide tartrique de devenir hydroscopiques sous l'influence des rayons lumineux. Il soumettait à la lumière sous le cliché négatif une glace recouverte d'un mélange de cette nature, puis y passait un blaireau contenant de la poudre de charbon, qui adhérait aux parties impressionnées et devenues hydroscopiques; enfin il la recouvrait d'une couche de collodion, qu'il reportait sur une feuille de papier et qui entraînait avec elle le charbon, reproduisant ainsi le dessin en positif sur le papier.

Tel était l'état de la science et de la pratique un peu avant 1870. Quels ont été les progreès accomplis depuis cette date? Quelle est la situation actuelle?

Parmi les divers procédés négatifs, c'est-à-dire parmi les procédés fournissant des phototypes à valeurs inverses, d'où on passe soit au tirage de multiples épreuves positives, soit à la confection de planches pour les impressions mécaniques, le procédé au collodion reste en faveur dans les ateliers de photogravure; il garde la suprématie au point de vue de la délicatesse et de la finesse des détails.

Le procédé au gelatino-bromure d'argent domine les autres applications de la photographie. Ses initiateurs, à des titres différents, ont, été fort nombreux; la chaîne va de Poitevin (1850) à Bennett, qui, le premier, publia en 1878 une excellente formule de préparation, en se fondant sur la sensibilité extrême prise par le gélatine-bromure, quand il à été soumis pendant quelques jours à une température de 30 degrés ou pendant quelques heures à une température de 100 degrés. Cette sensibilité est telle qu'on doit l’évaluer couramment par centièmes de seconde et qu'on descend meme aux millièmes de seconde. Déposé sur verre, le gélatine-bromure d'argent se conserve sans altération durant des années, et l'impression reçue offre une longue persistance.

C'est de l'invention des plaques à la gélatine sèche que date la diffusion des appareils portatifs.

Les plaques sensibles ordinaires sont plus rapidement impressionnées par les rayons bleus et violets que par les rayons rouges, oranges, jaunes ou verts. Elles faussent dès lors la gamme des tons lumineux dans les reproductions d'objets polychromes. L’emploi savemment réglé de certaines substances, en particulier de matières colorantes extraites du goudron de houille, a permis d'exalter la seirsibilité pour telle ou telle catégorie de rayons, de modérer l'activité d'autres rayons, de faire ainsi des plaques orthochromatiques, dont l'usage se combine avec celui d'écrans colorés. Ensuite sont venues les plaques panchromatiques, également sensibles à toutes les couleurs et respectant d’une manière complète les tonalités relatives. Plus tard, on a trouvé le moyen d'établir des plaques orthochromatiques, portant elles-mêmes leur écran. Il est regrettable que les plaques orthochromatiques et surtout les plaques panchromatiques ne se soient pas répandues davantage: l'objection tirée du ralentissement de l'impression ne saurait être considerée comme plausible, car le délai de pose, quoique allongé, reste très faible.

Une défectuosité des images, connue sous le nom de halo, est engendrée par la réflexion, sur la face postérieure du verre, des radiations qui ont traversé la couche sensible. Plusieurs expédients peuvent être mis en œuvre pour y obvier. II existe des plaques anti-halo, malheureusement un peu coûteuses.

En vue de rendre plus portatifs les appareils photographiques, on remplace souvent les plaques à support de verre par le papier ou lespellicules de celluloïd au gélatino-bromure d'argent, enroulés en bande continue dans des châssis spéciaux et susceptibles de recevoir une succession de négatifs. Cette substitution s'imposait d'ailleurs pour certaines chambres panoramiques et pour les appareils cinématographiques.

Il y a lieu de mentionner encore: les plaques spéciales propres à la photogravure ainsi qu'à la copie des sujets blancs et noirs, plaques dont la sensibilité est moindre, mais qui assurent une grande finesse; les plaques à pellicules réversibles, appropriées aux besoins de la photogravure et d la photocollographie.

Les révélateurs usuels se sont longtemps bornés au sulfate de fer, à l'acide gallique et à l'acide pyrogallique.

Actuellement, la photographie dispose d'un assez grand nombre d’autres réducteurs, préparés dans des conditions commodes pour le tansport et l'emploi.

Des renforcateurs et cles affaiblisseurs de négatifs sont respectivement fabriqués avec du bi-iodure de mercure et du sulfate d’ammoniaque.

Au premier rang des procédés photochimiques par lesquels on tire d’une epreuve négative un nombre plus ou moins considérable d'épreuves positives se placent les procédés aux sels d'argent, chlorure, bromure, citrate, lactate. Le commerce vend aujourd'hui des surfaces scnsibles toutes prêtes, notamment sur papier; des plaques spéciales sont aussi fabriquées pour les épreuves positives devant être vues par transparence, dites diapositives et employées aux projections ou utilisées soit dans le stéréoscope, soit dans le vitrail.

Dans le procédé au platine, le papier est recouvert d’un enduit d’oxalate ferrique et de chlorure de platine; la lumière fait passer l’oxalate ferrique à l’état d'oxalate ferreux; ce dernier composé, au sein d’une solution d’oxalate de potasse, précipite instantanément le platine et provoque la formation d'une image très stable.

Le procédé au charbon ou à la gomme bichromatée n'est autre que celui de Poitevin, dont j'ai déjà rappelé le principe. On emploie du papier enduit d'une mixture de charbon en poudre, de gélatine et d'eau, sensibilisé par une immersion de quelques minutes dans une solution de bichromate de potasse ou d'ammoniaque, puis séché dans l'obscurité. L'exposition de ce papier à la lumière sous un négatif détermine par insolubilisation partielle une image latente, qui est ensuite developpée au moyen de l'eau chaude. Ce développement exige presque toujours un ou plutôt deux transferts de la couche insolée, le premier transfert donnant une image renversée et le second une image redressée. Des méthodes évitant une telle complication ont été indiquées et appliquées pour le trait et la demi-teinte continue. Le charbon peut, d'ailleurs, être remplacé par d'autres matières colorantes inertes.

Un procédé de la même famille, dit procédé aux poudres, que je me contente de mentionner, fournit des images accusées par de la poudre d'émail. Après diverses manipulations, l'épreuve est vitrifiée au moufle.

Les dessins linéaires se reproduisent, soit au ferro-prussiate qui donne d'abord un negatif (image blanche sur fond bleu), d'où se déduisent les positifs (bleu sur blanc), soit au cyano-fer ou au gallate de fer, qui aboutissent immédiatement à des positifs.

Des l'origine, les créateurs de la photographie ont cherché à produire des planches, qui permissent le tirage d'épreuves positives sans le secours de la lumière et par des moyens purement mécaniques.En 1824 Nicéphore Niepce obtenait les premières planches graveées sur étain. Quelques années plus tard, des plaques daguerriennes étaient , à leur tour, transformées en planches gravees. Vers 1852, Talbot réussissait des éssais de gravure sur acier ou sur zinc; puis il améliorait progressivement ses méthodes et concevait notamment l'idée des trames ou réseaux, qui devait être reprise par ses successeurs.

Cependant; en 1854, l'illustration du livre au moyen de la photographiedébuta par des épreuves photochimiques ordinaires. Le tirage des épreuves était lent et coûteux; il y avait défaut d'harmonie entre le texte et les planches.

Les recherches furent poursuivies avec ardeur. Sans énumérer tous les savants ni tous les spécialistes qui s'y consacrèrent, il est juste de citer au moins deux noms, ceux de Poitevin et de Woodbury. On doit à Poitevin la photolithographie ainsi que l'impression á l'encre grasse sur gélatine bichromatée et l'aquatinte photographique. Woodbury prit un brevet pour la photoglyptie, dont l'élément essentiel était le moulage au plomb, sous la presse hydraulique, d'une épreuve en gélatine bichromatée.

Actuellement, les procédés d'impression photomécanique sont les suivants :

1º Photolithographie et ses dérivés. - Ce procédé consiste à dessiner photographiquement l'image sur la pierre lithographique, enduite de bitume de Judée ou de gélatine bichromatée, puis à aciduler, encrer et imprimer comme dans la lithographie ordinaire. La pierre, trop volumineuse et trop lourde, a fait place au zinc (photozincographie) ou à l'aluminium (algraphie).

Photocollographie. - De la gélatine bichromatée est étendue sur une dalle en verre et impressionnée à travers un cliché négatif. Les parties frappées par la lumière prennent l'encre et repoussent l’eau; au contraire, les autres parties absorbent l’eau et repoussent l'encre. On a ainsi une surface lithographique excellente pour un tirage restreint d'épreuves au trait ou à modelé continu.

3º Phototypographie; similigravure. - La phototypographie donne des planches en relief; elle a le très grand avantage de Se prêter à l'impression simultanée du texte et des figures qui s'y intercalent. Pour la reproduction de sujets au trait, l'opération offre une extrême simplicité: on recouvre la planche métallique de bitume ou d'un mucilage bichromaté, on l'impressionne à travers un négatif et on crée de la sorte des réserves entre lesquelles sont pratiquées des morsures successives. Quant à la phototypographie en demi-teinte ou similigravure, elle présente plus de complication: afin d'imiter la gravure au burin ou au pointillé, on interpose sur le parcours des rayons lumineux en avant de la plaque sensible un réseau de lignes simples ou croisées et très rapprochées; effets de diffraction atténuent plus ou moins les effets de la trame suivant l'intensité des radiations; les traits ou les points constituent le modelé.

4º. Photogravure en taille-douce. - C'est l'inverse de la phototypographie. La gravure au trait se réalise facilement par la même méthode que la phototypographie linéaire, sauf emploi d'un positif au lieu d'un négatif; elle ne nécessite qu'une ou plusieurs morsures peu pofondes, mais ne permet pas l'intercalation dans le texte et reste, dès lors, limitée aux œuvres où la pureté et la précision sont indispensables. Pour la gravure a demi-teinte, ie procédé le plus usuel est celui de l'aquatinte : il consiste à répandre sur la plaque de cuivre un grain de résine très régulier, à assurer l'adhérence de ce grain par la chaleur, à déposer ensuite la couche sensible, à l'impressionner au travers d'un positif et à pratiquer la morsure au moyen du perchlorure de fer qui traverse plus ou moins rapidement les zones d e gélatine selon leur épaisseur, c'est-a-dire selon l'impressiom lumineuse qu'elles ont reçue; cette gravure ne convient qu'aux ouvrages de luxe.

La gravure en relief ou en creux s'adapte aux impressions polychromes. Mais un problème autrement intéressant était celui de la reproduction directe des couleurs.

Reprenant des observations de Siebeck, J. Herschel1 et Hunt, au sujet de l'action d'un spectre très lumineux sur du papier sensibilisé par le chlorure d'argent, Edmond Becquerel parvint, le premier, à obtenir, vers 1848, des images en couleurs. Il employait, dans ce but, des plaques daguerriennes et formait à leur surface du sous-chlorure d'argent violet, au moyen de courants électriques et dans l'obscurité.Malheureusement, les images s'altéraient bientôt à la lumière blanche.

Niepce de Saint-Victor et Poitevin tentèrent, sans succès, d'accroître la stabilité des épreuves. Leurs recherches avaient, d'ailleurs, un caractère purement empirique.

En 1889, M. Lippmann éclaira la question d'un jour éclatant par sa découverte de la photographie interférentielle. Quand une couche sensible transparente est mise en contact avec un miroir réfléchissant, par exemple avec une couche de mercure, la rencontre des rayons incidents et des rayons rfleéchis produit des interferences au sein de cette couche sensible, y détermine des zones d'obscurité et des zones de clarté, y forme une sorte de réseau lamellaire composé alternativement d'espaces translucides et de lames obscures d'argent réduit. Les intervalles des lamelles correspondent aux longueurs d'onde des diverses couleurs du spectre (4 à 7 dix-milliémes de millimétre); elles donnent une couleur correlative à ces longueurs. Il sufit d'une seule plaque; d'une seule pose et d'un seul développement. Les couleurs demeurent fixées après un passage à l'hyposulfite. En fait, il n'y à pas de couleur sur la plaque; mais les lamelles décomposent la lumière blanche, font apparaître à l'œil les couleurs simples et même les nuances infinies des couleurs composées, rendent la coloration de l'objet reproduit. M. Lippmann a obtenu des résultats admirables. Néanmoins et malgré les progrès accomplis dans la préparation des plaques, la découverte n'est pas encore sortie du domaine scientifique.

Il y a peu de temps, M. Lippmann apportait une nouvelle contribution à la photographie des couleurs. Lorsque la couche sensible employée pour l'application de sa méthode est une pellicule bichromatée, on la fixe par un simple lavage à l'eau: les couleurs apparaissent en même temps, visibles tant que la couche reste humide; elles disparaissent par dessiccation et reparaissent chaque fois que l'on rend de l'humidité à la plaque. En substituant è l'eau pure une dissolution aqueuse d'iodure de potassium pour l'imbibition de la plaque, M. Lippmann a rendu les couleurs persistantes, quoique faiblement visibles, après séchage. Versant ensuite sur les couches ainsi chargées d'iodure de potassium à l'état sec une dissolution de nitrate d'argent , a 20 p. 100, il est parvenu à obtenir des couleurs extrêmement brillantes, qui subsistent avec tout leur éclat quand la plaque a été lavée et sechée. Les couleurs vues par transparence sont d'ailleurs changées en leurs complémentaires. Si on arrivait au même résultat en partant, non plus de couches bichromatées, peu sensibles et peu isochromatiques, mais de pellicules au gélatinobromure, il deviendrait possible de multiplier les épreuves en couleurs par tirage au châssis-presse, comme dans le cas de la photographie ordinaire.

Un jour, la pratique s'emparera de la photographie interférentielle. En attendant, elle recourt au procédé trichrome dont les précurseurs ont été H. Collen (1865), Ransonnet, Cros et L. Ducos du Hauron, et qui a pour base la proprieté des trois couleurs primaires rouge orange, vert jaunâtre et bleu violet, de pouvoir reproduire par leurs combinaisons toutes les autres couleurs spectrales. On fait trois négatifs correspondant à ces trois couleurs au moyen de plaques d'une sensibilité appropriée ou de plaques panchromatiques et d'écrans de la même couleur interposés sur le trajet des rayons lumineux. Ces négatifs permettent de passer aux positifs des couleurs complémentaires. Si la photographie doit être vue en projection, il sufit de colorer les positifs par des pigments placés dans la couche sensible, puis de projeter les trois images sur un écran blanc en les repérant avec soin; le même mode de coloration convient aux vues stéréoscopiques. Pour la photocollographie, on procède par voie de teinture. La phototypographie exige l'emploi de trames auxquelles on imprime une rotation de 30º, entre la première et la deuxième épreuve, puis entre la deuxième et la troisième. Quelquefois, l'addition d'une ou de deux impressions supplémentaires devient indispensable au rendu de toutes les nuances, ce qui complique encore les opérations. Les poses successives et identiques étant presque impossibles pour le portrait, l’industrie livre maintenant des chambres trichromes qui donnent á la fois les trois négatifs. Je dois enfin mentionner, sans y insister, les chromoscopes, appareils de contrôle de la trichromie photographique.

Récemment, MM. Lumière ont imaginé une nouvelle méthode d'obtention de photographies en couleurs, dont voici les traits essentiels d'après une communication du 30 mai 1904 à l'Académie des sciences. Des grains de fécule, divisés en trois lots, puis teints respectivement en rouge orange, en vert et en violet, sont, après dessiccation, mélangés dans des proportions convenables et étalés sur une lame de verre, qui a été préalablement recouverte d'un enduit poisseux. La surface ainsi preparée reçoit une couche d'un vernis mince, imperméable et possédant un indice de réfraction voisin de celui des grains de fécule. Sur ce vernis est coulée une émulsion sensible panchromatique au gélatino-bromure d'argent. On expose la plaque par le dos, de telle sorte que les faisceaux lumineux venant de l'objectif traversent les particules colorées avant d'atteindre la couche sensible. Le développement s'effectue à la manière ordinaire; mais, si l'on se contente de fixer la plaque à l'hyposulfite de soude, on a un négatif donnant, par transparence, les couleurs complémentaires de celles de l'objet photographié. Pour rétablir l'ordre des couleurs, il sufit, après développement, d'inverser l'image en dissolvant l'argent réduit par cette opération, et ensuite, sans fixer, de développer le bromure d'argent non influencé par la lumière lors de l'exposition dans la chambre noire.

Des perfectionnements continus ont été apportés aux appareils, et on est loin de l'outillage rudimentaire de Nicéphore Niepce ou de Daguerre.

Le premier objectif de Niepce fut une lentille détachée de son microscope. Parmi les savants à qui cet élément essentiel de l'outillage doit ses progrès les plus marqués, on peut citer Petzwal, physicien de Vienne, dont les calculs permirent de remplacer l'objectif simple à petit diaphragme, trop lent pour le portrait, par des objectifs doubles à grands diaphragmes beaucoup plus lumineux et plus rapides. Bertsch étudia de très près la question des objectifs; il combattit l'exagération du diamètre qui, suivant lui, ne devait pas depasser 0 m. 07, sous peine d'embrasser un angle plus ouvert que ne le font nos yeux et de produire, par suite, une déformation apparente des objets; il lutta aussi contre l'augmentation excessive de la distance focale, qui détruisait la netteté des premiers plans. À une époque récente, la maison Zeiss, d'Iena, réalisa d'importantes améliorations, grâce aux qualités réfringentes de ses verres; ses premiers anastigmats datent de 1891. Sous l'impulsion de MM. A. Martin et Wallon, nos opticiens, aidés par Mantois qui fabriqua les verres spéciaux nécessaires, sont parvenus à rivaliser avec leurs concurrents d'Allemagne.

Peu à peu, les appareils se sont sériés et appropriés à leur destination particulière. On sait l'immense essor pris par les appareils portatifs, jumelles, detectives, kodaks, vérascopes, etc.: il y a eu là un vaste champ pour l'ingéniosité des constructeurs. Des chambres accouplées ont été faites en vue des épreuves stéréoscopiques. Aux volumineux appareils panoramiques s'est ajoutée une categorie d'appareils très légers, remplissant le même office et fonctionnant à l'aide de bobines pelliculaires. Mentionnons aussi les appareils adaptes à l'emploi des trames de la similigravure ou à la trichromie.

Depuis la multiplication des chambres à main et la préparation de plaques d'une extrême sensibilité, on s'est preoccupé sans cesse de la structure et du fonctionnement des obturateurs. L'obturation dans la chambre noire près du chassis porte-plaque paraît la meilleure.

La cinématographie est une conquête relativement récente. Son origine remonte pourtant à 1873. En effet, au cours de cette année, M. Janssen imaginait son revolver astronomique pour enregistrer sur plaque daguerrienne les phases successives du passage de Venus devant le soleil: au foyer de la lunette braquée vers le soleil était une chambre photographique dont la plaque sensible tournait par saccades.

Cinq ans plus tard, Muybridge, de San-Francisco , saisissait les allures d'un cheval au moyen d'une série d'appareils photographiques: les obturateurs de ces appareils étaient successivement déclenchés par des fils que le cheval rompait en parcourant la piste.

En 1882, Marey créait la chronophotographie sur plaque fixe devant un champ obscur: un disque opaque percé de petites ouvertures et placé à l'avant de l'objectif était animé d'un mouvement de rotation continue; le passage des ouvertures déterminait les images successives des diverses attitudes d'un animal circulant ou volant entre le champ obscur et l'appareil, pourvu que cet animal fût vivement éclairé. Au lieu de se contenter d'un seul champ obscur avec son appareil, Marey ne tarda pas à en établir trois perpendiculaires entre eux, pour enregistrer les attitudes par rapport aux trois dimensions de l'espace et modeler ensuite les figures. L'obligation d'opérer devant un champ obscur restreignant beaucoup les expériences possibles, il analysa le vol libre des oiseaux à l'aide d'un fusil photographique, qui rappelait le revolver de M. Janssen, mais donnait des images 800 fois plus freéquentes.

M. Londe revint, en 1883, à la méthode de Muybridge et la perfectionna. Un dispositif analogue permit à M. le général Sébert d'analyser les phases du lancement des torpilles.

Afin de multiplier les images sans les superposer et les confondre partiellement, Marey recourut, en 1887- 1888, à divers expédients: limitation de l'éclairement et de la photographie à une ligne du sujet; mise en mouvement de l'appareil; réception du faisceau lumineux par un miroir mobile qui le renvovait à l'objectif. Puis vinrent trois modèles d'appareils pour la chronophotographie sur bande pelliculaire: un dispositif mécanique assurait la translation de la bande et son arret à chaque passage d'une fenêtre éclairante. À ces difiérents appareils s'en ajouta un autre combiné de telle sorte que l'opérateur pût, à volonté, travailler sur plaque fixe ou sur bande pelliculaire.

Comme Muybridge, Anschutz et Demeny, Marey chercha à réaliser, par la méthode de Plateau, la synthése des mouvements analysés. Lors de l'Exposition universelle de 1889, un zootrope montrait ainsi des hommes et des animaux en mouvement; mais il contenait trop peu d'images. En 1 893, Marey fit établir un projecteur chronophotographique à bande sans fin: l'instrument comprenait un jeu de lentilles et de miroirs pour l'éclairement, un mécanisme pour la mise en mouvement de la bande chargée d'images, un disque obturateur à fenêtres arrêtant ou laissant passer le faisceau lumineux, un objectif de grossissement; la pellicule s'arretait à chaque passage d'une fenêtre de l'obturateur. Si ingénieux qu'il fût, ce projecteur laissait subsister un sautillement fâcheux des images sur l'écran.

Pareille défectuosité n'existait plus dans le kinétoscope de M. Edison (1894), où la pellicule sensible était perforée à intervalles réguliers et entraînée par un cylindre à chevilles; ici la bande ne subissait pas d’arrêt, et la brièveté des périodes d’éclairement ( 1/7,000 de seconde) assurait la netteté des images.

MM. Lumière résolurent complètement, en 1895, le problème des projections de scènes animées, par leur admirable cinématographe. Les vues étaient recueillies sur une pellicule perforée comme celle d'Edison, entraînée par des grifles et passant d'une manière intermittente au foyer de l'objectif. Pour les projections, la bande recevait son mouvement d'un excentrique triangulaire, graduant les vitesses d'arrêt et de départ; une lampe électrique puissante l’éclairait vivement; les périodes d'arrêt représentaient les 2/3 du temps total. Les visiteurs de 1'Exposition de 1900 ont vu dans la salle des Fêtes un cinématographe géant, qui fournissait un grossissement linéaire de 800 et un grossissement superficiel de 640,000.

Parmi les variantes de cinématographes, on peut citer l'appareil du capitaine Gossart, à objectif oscillant (1867).

De son côté, Marey poursuivait la recherche d'une parfaite équidistance des images. Il réussit, par une modification du premier laminoir d'entraînement, sans perforer les pellicules. D'autre part, il corrigea, au moyen d'un frénage sur la bobine magasin servant aux projections, le retrait que les développements successifs déterminent toujours dans la pellicule positive.

Enfin, pendant l'année 1899, ce savant adapta la chronophotographie aux études microscopiques, en limitant les périodes d'éclairement a 1/500 de seconde pour soustraire les animaux à l'action de la chaleur et imagina le fusil chronophotographique à bande pelliculaire.

Point n'est besoin d'insister ici sur le, rôle immense et sans cesse grandissant de la photographie.

Elle domine dans l'illustration du livre et y a déterminé une véritable révolution par l'abaissement du prix des planches et des figures, aussi bien que par la fidélité des reproductions. On peut maintenant illustrer les ouvrages sans compter les gravures avec la même parcimonie; l'illustration est devenue abordable pour de nombreuses publications qui naguére en restaient dépourvues; les descriptions sèches et arides vivent, s'animent, se clarifient et prennent plus de simplicité.

Les arts, qui d'abord firent grise mine à la photographie, lui demandent fréquemment son concours et trouvent en elle un merveilleux instrument de vulgarisation. Son emploi permet de répandre dans les couches profondes de la population la connaissance des œuvres artistiques, tableaux, sculptures, monuments.

C'est peut-être à la science que la photographie rend les plus éclatants services. La « rétine scientifique » possède un pouvoir de vision incomparablement supérieur à celui de l’œil, aidé des meilleurs instruments; elle découvre des astres inconnus, révèle les etoiles de 17e et de 18e grandeurs, décompose les nébuleuses: on peut dire que le gelatinobromure d'argent voit l'invisible. Des clichés d'une sincérité irrécusable enregistrent les phénomènes célestes. La carte photographique du ciel, dont j'ai parlé dans un précédent chapitre, restera comme le legs precieux du XIX siècle.

À côté de l'invisible par la distance, il y a l'invisible par les dimensions. La photographie reussit á montrer l'infiniment petit avec des grossissements qui atteignent 11,000 diamètres.

Née d'hier, la radiographie, dont le regard traverse les corps opaques, a déjà étendu et étendra davantage encore le champ des explorations photographiques.

La chronophotographie est un puissant auxiliaire des études physiologiques: locomotion terrestre, locomotion dans l'eau, locomotion dans l'air, mouvements fonctionnels, phénomènes nerveux, etc., s'analysent et se synthétisent avec une impeccable rigueur. En géométrie, les appareils chronophotographiques fournissent l'image des surfaces, sphéres, hyperboloïdes de révolution, etc., qu'engendre une tige blanche et éclairée, dans ses déplacements entre l'objectif et le champ obscur; en mécanique, ils se prêtent à des constatations du plus haut intérêt sur la chute des corps, sur les faits si complexes de l'hydrodynamique, sur les mouvements de l'atmosphère, sur la résistance de l'air aux appareils volateurs, sur les vibrations des cordes.

II n'existe pour ainsi dire pas de laboratoire qui n'ait dans ses dépendances nécessaires un atelier photographique.

M. le colonel Laussedat a été l’initiateur de la métrophotographie, art de restituer les plans et élévations des monuments ou les plans de terrains avec courbes de niveau, d'après des vues photographiées.

La photographie est l'auxiliaire incessant de l’industrie dans toutes ses branches.

Elle sert á l'Administration sous les formes les plus diverses. Pour ne citer qu'un exemple, on a vu, pendant le siège de Paris, un seul pigeon voyageur emporter jusqu'a 40,400 dépêches réduites à une échelle infinitésimale et tirées sur pellicule.

Non contente de son domaine terrestre, la photographie a conquis les airs avec le ballon et le cerf-volant. Elle est en tout et partout.

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