quinta-feira, 4 de junho de 2009

1855

VISITE A L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE PARIS, EN 1855.
sous la Direction de M . Ttresca
Paris, Librairie de L. Hachette et Cº., Rue Pierre-Sarrazin, Nº.14.
1855.
pags. 748 ,754
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Nous voici arrivés maintenant à une partie de l'Exposition, dont on s'est fort occupé depuis quelques années, et qui est en grande voie de progrès, je veux parler de la photographie sur papier; je ne ferais pas ici l'histoire de la belle découverte de M. Daguerre et de M. Niepce de Saint-Victor, qui y a apporté tant de précieux perfectionnements: il est peu de personnes qui l'ignorent; je ne m'occuperai que des épreuves obtenues par la substitution de la glace collodionnée ou albuminée, ou du papier préparé, à la plaque de métal. L'absence du miroitement si désagréable dans ces dernières, et la facilité de conserver et d'em+prter en portefeuille un grand nombre d'épreuves, ont fait dès les premiers pas donner la préfèrence à ce système, et voici en quelques mots en quoi consiste l'opération. Une glace bien nette remplace la plaque: pour la rendre sensible à l'action de la lumière on la couvre d'une couche d'albumine ou de collodion, opération qui exige pour avoir des glaces bien nettes et exmptes de stries, une assez grande habilité de main, que l'exercice du reste fait bientôt acquérir; puis, quand le collodion est étendue bien également sur le verre et encore humide, on plonge la glace pendant quelques secondes dans un bain de sel d'argent, qui lui donne la sensibilité: on expose à la lumière dans la chambre noire: on retire la glace au bout du nombre de secondes voulu, en la préservant de toute impression de lumière extérieure, puis dans un endroit noir, éclairé seulement par une bougie, on fixe l'image obtenue par des lavages, dont on trouvera l'indication dans tous les ouvrages sur la photographie. L'image, une fois fixée, sert de matrice à un nombre indéfini d'épreuves, que l'on obtient en la posant sur une feuille de papier préparé, et en l'exposant dans un cadre à l'action du soleil ou même de la lumière diffuse. On opère également avec des papiers préparés qui remplacent la glace albuminée ou collodionée et donnent aussi de très-belles épreuves, comme on peut s'en convaincre, dans celles de M. Bougemier (Nº. 9137). Il est encore une opération dans la photographie, dont il faut dire un mot avant d'aller plus loin, c'est ce qu'on a appelé l'héliographie, c'est-à-dire gravure obtenue par l'action de la lumière sur plaque de métal, avec assez de profondeur pour pouvoir tirer des épreuves. C'est à Nièpce de Saint-Victor que l'on doit ce procédé, qui donne déjà de beaux et curieux résultats, mais auxquels le graveur retouche trop, pour qu'on puisse dire que c'est la lumière elle-même qui grave directement et donne ces belles épreuves.
Malgré tout ce que nous venons de dire de la photographie sur papier, nous ne voulons pas passer sous silence ceux de nos photographes qui sont restés fidèles aux épreuves sur plaque, et nous commencerons notre revue par eux.
M. Millet est incontestablement celui qui marche en tête: ses épreuves, soit portraits, soit monuments, soit groupes, sont magnifiques de netteté, et obtenues presque instantanément. Parmi les épreuves exposées par cet artiste il y en a qui, plus tard, acquerreront beaucoup de prix: ce sont celles qui ont rapport aux travaux sucessifs du Louvre. Après lui, M. Plumier, puis M. Vaillat, M. Thierry, et M. Sabatier, qui exposent de très-beaux portraits, qui luttent avec avantage avec les beaux portraits américains.
Mais la partie la plus remarquable de l'exposition photographique est dans la reproduction des paysages et des monuments: excepté M. Fenton et M. Maxvell Lyte en Angleterre, nos artistes n'ont aucune concurrence à redouter. M. Giroux, qui se présente le premier, a des paysages bien remarquables, où l'on reconnaît de suite dans le choix des sites le goût d'un artiste et d'un paysagiste: MM. Bisson frères, qu'il suffit de nommer; rien ne saurait surpasser leur vue panoramique de Paris, prise des toits du Louvre: il y a là des lointains très-bien réussis, chose rare en photographie, et comme monuments, leur grande épreuve de la cour du Louvre, et la porte de la Bibliothèque impériale, sur le quai des Tuileries: ce sont trois chefs-d'oeuvres; puis une reproduction de Rembrandt, d'Albert Durer, et divers objects de l'Exposition, redus avec leur habileté ordinaire. M. Baldus rivalise avec Bisson pour la grandeur et la beauté des épreuves: nous avons remarqué surtout sa vue du Mont-Dore et du lac Chambon, et celle des arènes de Nîmes: il y a aussi une petite vue de vallée avec un moulin, parfaite en tous points. Puisque nous en sommes aux paysagistes, admirons les épreuves de M. Martens, qui nous donne une vue générale du Mont-Blanc, d'aprés ses études séparées, qui sont d'une finesse extraordinaire. M. le comte de Béranger a également une série de paysages très intéressante, une étude d'arbre entre autres prise en hiver, puis une reproduction de Rembrandt. M. Aguado termine cette série de paysagistes habiles par de très-belles épreuves, d'une rare finesse de modelé.
En Angleterre, comme nous l'avons dit plus haut, M. Fenton, est le plus remarquable, et, nous pouvons l'avouer sans blesser l'amour-propre de nos artistes, le plus fort: il y a surtout une photographie intitulée Hack fall, qui est d'une finesse de modelé et d'une étendue de lointains que nous ne trouvons chez aucun des nôtres; puis ensuite Walley of the Wharf, et Boston Abbey. Il est moins heureux dans ses groupes animés, que je trouve secs et noirs. M. Maxwell Lyte marche sur ses traces, et nous offre une série de vues des Pyrénées, très-remarquables par la profondeur et la transparence des lointains. M. Newton a des études au microscope très-bien réussies; M. Sherloch, des études de nuages, saisies avec une instantanéité très-heureuse, et qui peuvent servir de précieux renseignements pour les peintres. Dans la Grèce, M. Philippe Margaritis nous a donné de belles épreuves des beaux monuments d'Athènes et de leurs bas-reliefs; à Florence, MM. Alinari frères, des vues du Campo-Santo, rendues avec toute la richesse de leurs détails; à Rome, M. Dovizielli, sa vue très-remarquable d'une cascade dans l'intérieur d'un palais, et d'une chute d'eau près de Rome.
En nous occupant maintenant de la reproduction des monuments, statues et bas-reliefs, nous placeront M. Bayard en première ligne: la beauté des épreuves de cet artiste est tout à fait hors ligne, et quand on aura vu ses belles photographies de la Vénus de Milo et de ses bas-reliefs d'aprés Clodion, on redra justice à la vérité de notre assertion. Rien n'égale la pureté et la douceur de ses blancs dans la reproduction des statues. M. Lessecq vien après lui, ainsi que M. Legray, pour nos monuments gothiques; tous leurs négatifs sont obtenues sur papier.
Nous terminerons cette revue de la photographie par la série des portraits; il y a ici deux manières de les envisager, soit au point de vue de l'art lui-même, soit au point de vue du commerce: nous comprenons dans cette dernière série tous les portraits retouchés, car ce n'est plus le photographe qu'il faut juger, mais le peintre aquarelliste. M. Belloc, selon nous, est le seul qui offre une très-belle série de portraits sans retouche et parfaitement réussis: aprés lui et avec des degrés différents de pureté de teinte ou de bonheur de pose, MM. Mayer, d'Olivier, qui a reproduit avec bonheur la galerie de nos célébrités industrielles; Reutlinger, d'Anguy, Wulf, dont les épreuves sur toile cirée sont très-fines de détails; Laverdet et M. Fournier et Gardel, de Limoges.
Il est quelques photographes dont je ne me suis pas occupé plus haut, parce qu'ils ont essayé et réussi dans tous les genres: M. Disdéry est le plus habile de tous et s'il parvenait à éclairer un peu plus ses beaux portraits sur toile cirée, ce sreainent de vrais chefs-d'oeuvre; dans l'état où il nous les offre, l'aspect en est triste. M. Disdéry s'occupe en outre dans ce moment-ci d'un ouvrage qu'il intitulera, je crois, le Portefeuille de l'Exposition: nous en avons vu quelques planches; c'est excessivement remarquable et d'un prix accessible, car c'est là un des défauts de la photographie, que d'être hors de la portée des bourses communes. MM. Thompson et Bingham, méritent aussi une place à part pour leurs portraits grands comme nature et obtenues directement. N'oublions pas le cadre si remarquable de M. Tournachon, où nous trouvons reproduites avec un rare bonheur toutes les poses et toutes les grimaces, si fines, de notre pierrot français, Dedureau: plus un beau portrait de Dantan jeune et d'autres belles études.
Pour ne rien passer sous silence de ce qui regarde la photographie, disons quelques mots de ce qu'on a appelé l'héliographie, et dont nous avons parlé plus haut. M. B. Delessert occupe le premier rang avec son cadre qui renferme la reproduction de ces belles gravures de Marc Antoine, devenues si rares et si chères, et que ce nouveau procédé met à la portée de tous; puis MM. Négre et Riffault.
On nous a cité parmi les étrangers à Munich, les beaux portraits de M. Hanfstangl, en disant même que nous n'avions rien de comparable; je crois qu'il y a là exagération: les poses sont heureuses, mais pour la pureté, Belloc, dont il est l'élève, l'égale s'il ne le surpasse.
Pour résumer cette revue de la photographie, félicitons-nous de la voie de progrès dans laquelle elle est entrée et des services qu'elle peu rendre à l'art et à la science, comme les belles épreuves de M. Bertsch et Arnaud, et Rousseau nous le prouvent. Ses ennemis disent qu'elle n'est pas durable, c'est une question que le temps peut seul résoudre; cependant nous avons vue des épreuves sur papier de M. Legray, qui sont faites depuis plusieurs années et qui n'ont pas changé.
Gravure photographique. - Dans l'un des coins les plus obscurs de l'Annexe, dans la galerie nord et en face du clocher qui domine les horloges de M.J.Wagner neveu, se trouve relégué un modeste atelier dont les productions marquent le point de départ d'une ère nouvelle dans l'art typographique. Il s'agit de la reproduction facile, et surtout fidèle, de toute espèce de dessins au crayon, d'épreuves typographiques, lithographiques, ou en taille-douce, etc., etc., au moyen de l'ingénieux procédé imaginé par MM. Salmon et Garnier, de Chartres.
Ce procédé repose sur un principe découvert en 1846 par M. Niepce de Saint-Victor, qui a constaté le premier que si on soumet à la vapeur d'iode un dessin ou une épreuve imprimée, les traits du dessin se chargeaient plus vite d'iode que le blanc du papier, et qu'on peu ainsi en obtenir, par la pression, un décalque soit sur papier encollé à l'amidon, soit sur une plaque de métal.
Procédant comme l'avait indiqué M. Niepce, MM. Salmon et Garnier prient les visiteurs d'exécuter, sur une feuille de papier, un dessin au crayon; ils exposent ce dessin à la vapeur de l'iode, puis l'appliquent sur une plaque de cuivre jaune poli, et soumettent le tout à l'action d'une petite presse à copier. L'iode, qui s'était fixé sur les traits du dessin, se décalque sur la plaque de cuivre. Prenant alors un peu de mercure sur un tampon de ouate, on en flotte la plaque et le dessin y apparaît, le mercure se portant sur tous les endroits touchés par l'iode, et respectant au contraire ceux que cette substance a laissés intacts. Pour isoler ce dessin du reste de la plaque, il suffit de passer par-dessus un rouleau de litographe chargé d'encre grasse qui, ne se déposant que sur les endroits exempts de mercure,rend le dessin beaucoup plus visible, et se détachant en blanc sur un fond noir. On se débarasse alors du mercure au moyen d'une dissolution de nitrate d'argent avec excès d'acide, et le métal de la planche se trouve à nu et même légèrement creusé.
Si l'on veut obtenir une planche en taille-douce, on continue à la faire mordre à la manière et avec des acides ordinaires. Si on veut tirer la planche dans les conditions de l'impression litographique, on détermine sur le dessin, par les procédés connus de l'électrotypie, un léger dépôt de fer réduit de son chlorhydrate, puis on enlève, au moyen de l'essence de térébenthine, l'encre grasse qui recouvre le fond de la planche.
On passe de nouveau la planche tout entière à la vapeur d'iode, et on la frotte de mercure qui s'étale alors sur toute la surface, moins les traits du dessin, ce qui constitue la planche dans une condition exectement inverse de son état précédent.
Dans le premier cas, les traits du dessin, chargés de mercure, ne prenaient pas l'encre du rouleau typographique qui la déposait exclusivement sur le reste de la planche. Dans son nouvel état l'encre va se déposer exclusivement sur les traits du dessin et permettre le tirage d'un nombre indéfini d'épreuves.
Telle est la série des opérations qui s'exécutent, avec un succès très- remarquable, devant les visiteurs émerveillés.
Il nous reste indiquer un résultat non moins important, dont les conditions exigent trop de temps pour en rendre le public témoin, mais que nous avons vu réaliser avec beaucoup d'intérêt. Nous voulons parler de la gravure en relief de ces mêmes planches, destinées alors à l'impression typographique.
Au lieu d'un dépôt de fer électrique, on produit sur les traits du dessein un léger dépôt d'or qui, préservant ces mêmes traits de l'action des acides, permet la morsure du reste de la planche à la profondeur qu'exige le tirage typographique.
Les divers résultats dont nous venons d'entretenir nos lecteurs ont déjà atteint un assez haut degré de perfection pour que nous croyions pouvoir considérer l'invention de MM. Salmon et Garnier comme un des progrès les plus importants que l'art typographique ait faits dans ces dernières années.

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