domingo, 6 de dezembro de 2009

Compte Rendu des Séances de L'Académie des Sciences

1843

13 de Fevereiro

Compte Rendu des Séances de L'Académie des Sciences

T. XVI

 Nº. 7

Pag. 402, 408

OPTIQUE. - Considèrations relatives à l’action chimique de la lumière; par M. Arago.

Une Lettre de M. Edmond Becquerel a donné lieu à une communication verbale de M. Arago que nous allons reproduire le plus fidèlement possible :

« Peu de temps aprés le vote de la loi qui accordait une récompense nationale à MM. Daguerre et Nièpce, il se manifesta, dans une petite portion du public , des opinions, à mon avis très-erronées, et qui, cependant, m’imposèrent le devoir de montrer que la nouvelle découverte ne devait pas être seulement considéréee du point de vue artistique, et qu’elle enrichirait la Physique de moyens d’investigation très-précieux. Tel fut le but d’une Note qui parut dans le Compte rendu de la séance du 19 AOUT 1839. Elle était ainsi conçue:

«  Voici une application dont le Daguerréotype sera susceptible, et qui me semble très-digne d’intérêt:

« L’observation a montré que le spectre solaire n’est pas continu, qu’il y existe des solutions de continuité transversales, des raies entièrement noires. Y a-t-il des solutions de continuité pareilles dans les rayons obscurs qui paraissent produire les effets photogéniques?

« S’il y en a, correspondent-elles aux raies noires du spectre lumineux ?

« Puisque plusieurs des raies transversales du spectre sont visibles à l’œil nu, ou quand elles se peigrnent sur la rétine sans amplification aucune, le problème que je viens de poser sera aisément résolu.

« Cette solution très-facile du problème que je m’étais proposé, je ne pouvais pas, en 1839, la chercher expérimentalement moi-même, l’ancienne chambre obscure de l’Observatoire ayant alors reçu une autre destination, et la nouvelle n’étant pas encore construite. Au reste, je dois supposer que mon appel fut entendu. J’ai appris, en effet, que la Société royale reçut, le 20 février 1840, un Mémoire de sir John Herschel où la question est effleurée, et chacun se rappelle ici que M. Edmond Becquerel entretint l’Académie de ce même sujet, dans la séance du 13 juin 1842. M. Herschel, n’ayant pas pu disposer d’un héliostat, crut ne point devoir se prononcer positivement sur l’existence des stries dans l’image photographique du spectre. M.E. Becquerel, au contraire, projeta sur sa plaque iodurée un spectre stationnaire, et vit nettement, après l’expérience, dans la région de la plaque que ce spectre occupait, des stries transversales le long desquelles la matière chimique était restée intacte, ou du moins n’avait reçu aucune modification perceptible. Il reconnut, de plus, que ces stries correspondaient exactement aux lignes sombres du spectre lumineux.

«  Au premier aperçu, l’expérience dont je viens de parler aurait pu sembler superflue: le résultat obtenu n’était-il pas, en effet, de vérité nécessaire? Comment attendre des actions photogéniques là ou la lumière manquait entièrement ?

« Voici ma réponse: Il n’est nullement démontré que les modifications photogéniques des substances impressionnables, résultent de l’action de la lumière solaire elle-même. Ces modifications sont peut-être engéndrées par des radiations obscures mêlées à la lumière proprement dite, marchant avec elle, se réfractant comme elle. En ce cas, l’expérience prouverait, non-seulement que le spectre formé par ces rayons invisibles n’est pas continu, qu’il y existe des solutions de continuité, comme dans le spectre visible, mais encore que dans les deux spectres superposés ces solutions se correspondent exactement. Ce serait là un des plus curieux, un des plus étranges résultats de la Physique.

« Introduisons dans la discussion un élément dépendant de la vitesse de la lumière, et les conséquences de l’observation ne seront pas moins intéressantes.

« Je montrai, il y a bien des années, que les rayons des étoiles vers lesquelles la Terre marche, et les rayons des étoiles dont la Terre s’éloigne, se réfractent exactement de la même quantité. Un tel résultat ne peut se concilier avec la théorie de l’emission, qu’à l’aide d’une addition importante à faire à cette théorie, dont la nécessité s’offrit jadis à mon esprit, et qui a été généralement bien accueillie par les physiciens: il faut admettre que les corps lumineux émettent des rayons de toutes les vitesses, et que les seuls rayons d’une vitesse déterminée sont visibles, qu’eux seuls produisent dans l’œil la sensation de lumière. Dans la théorie de l’émission, le rouge, le jaune, le vert, le bleu, le violet solaires sont respectivement accompagnés de rayons pareils, mais obscurs par défaut ou par excès de vitesse. A plus de vitesse correspond une moindre réfraction, comme moins de vitesse entraîne une réfraction plus grande. Ainsi, chaque rayon rouge visible est accompagné de rayons obscurs de la même nature, qui se réfractent les uns plus, les autres moins que lui: ainsi il existe des rayons dans les stries noires de la portion rouge du spectre; la même chose doit être dite des stries situées dans les portions jaunes, vertes, bleues et violettes. L’expérience ayant montré que les rayons contenus dans les stries sont sans effet sur les substances impressionnables, il se trouve établi que toute augmentation ou diminution de vitesse enlève aux rayons lumineux les propriétés photogéniques dont ils étaient primitivement doués; que les rayons solaires cessent d’agir chimiquement à l’instant même où ils perdent, par un changement de vitesse, la faculté de produire sur la rétine les sensations lumineuses. Je n’ai pas besoin de faire ressortir tout ce qu’il y a de curieux dans un mode d’action chimique de la lumière dépendant de la vitesse des rayons.

« Le lundi même où M. Ed. Becquerel présenta à l’Académie le résultat de l’expérience que j’avais proposée 2 ans et 10 mois auparavant, je l’invitai publiquement à la recommencer, en s’imposant des conditions nouvelles qui semblaient devoir jeter du jour sur la manière dont la vitesse modifie l’action chimique de la lumière. Je fis remarquer que les rayons solaires se mouvant de plus en plus vite à mesure que les milieux qu’ils traversent sont plus réfringents, on arriverait à quelque résultat utile, en étudiant, comparativement et simultanément, l’action du spectre sur la plaque iodurée plongée par moitié dans deux milieux très-dissemblables: dans de l’eau et de l’air, par exemple.M.. Ed. Becquerel voulut bien suivre cette idée. Voici la Lettre qu’il m’écrivit à la date du 25 novembre 1842.

«  Lorsque vous avez eu la complaisance de présenter à l’Académie des Sciences, au mois de juin dernier, mon Mémoire sur la constitution du spectre solaire, vous avez bien voulu m’indiquer une expérience à faire dans le but de savoir si, lorsqu’une substance impressionnable à l’action des rayons solaires est plongée dans un milieu autre que l’air, le changement de vitesse des rayons solaires, au passage de l’air dans ce milieu, ne déplaçait pas la position des raies ou des stries transversales du spectre des rayons chimiques.

«  Je me suis empressé aussitôt de faire ces expériences, en commenqant par employer de l’eau comme nouveau milieu. Mon départ pour la campagne m’a forcé de les interrompre. Je comptais à mon retour les reprendre avant de vous en faire connaître le résultat, mais le mauvais état de la saison ne m’a pas encore permis de donner suite à mon projet; j’ai l’honneur, néanmoins, de vous adresser le résultat de deux expériences que j’ai faites, avec la description du procédé que j’ai suivi.

« J’ai fait usage dune petite cuve à eau en cristal, à bords bien plans, et dune plaque préparée à la maniere de M. Daguerre, que l’on peut placer verticalement dans la cuve, de manière à ce que sa surface soit parallèle à la face antérieure de la cuve. Dans les deux expériences, la distance entre la plaque iodurée et cette face a été d’un centimètre. On introduit alors dans une chambre obscure un faisceau de rayons solaires à travers une fente étroite pratiquée dans le volet; on réfracte ces rayons à travers un prisme de flint bien pur, devant lequel se trouve placée une lentille à long foyer, de facon à obtenir un spectre solaire par projection avec toutes ses raies. Une fois ce résultat obtenu, on place devant la route du rayon réfracté , la cuve à eau, de manière à ce que le spectre se dessine bien horizontalement

avec toutes ses raies sur la plaque iodurée et de sorte que les rayons violets entrent normalement à la face antérieure de la cuve. On a eu soin, avant de commencer l’expérience de verser dans cette cuve de l’eau jusqu’à ce que son niveau coupe longitudinalement en deux parties égales l’image du spectre.

« Si, au bout d’une ou deux minutes d’action, on enléve la plaque, en l’exposant à la vapeur mercurielle on voit l’image du spectre se dessiner depuis la limite du vert et du bleu jusque bien au delà de l’extrême violet; et, comme je l’ai dit dans le Mémoire, cette image a toutes ses raies semblables à celles du spectre lumineux pour les portions de même réfrangibilité. Eh bien! on n’aperçoit aucune difference bien sensible entre l’image du spectre sur la portion de la plaque qui est restée dans l’air et celle qui s’est formée sur la portion qui a séjourné dans l’eau; les raies de ces deux portions de spectre semblent très-bien dans le prolongement l’une de l’autre, excepté toutefois dans les portions extrêmes du spectre chimique, à droite et à gauche, où les raies de l’image qui s’est produite dans l’eau semblent se resserrer un peu entre elles. Cela me paraît devoir être attribué à la réfraction des rayons obliques.

« Ces deux expériences tendent à montrer que la nature du milieu dans lequel est plongé la substance chimiquement impressionnable à l’action des rayons solaires, ne modifie pas l’action de ceux-ci, de sorte que l’impression du spectre solaire sur cette substance présente toujours les mêmes raies et aux mêmes places.

« Lorsque le temps le permettra, je compte reprendre ces expériences, les varier, et parvenir peut-être à des résultats plus concluants.

 

«  J’ai l’honneur d’être, etc. «

 

«  Voilà donc les rayons solaires se comportant exactement de même dans l’air et dans l’eau. Dans l’air, cependant, suivant le système de l’émission, la lumière se meut beaucoup moins vite que dans l’eau. La vitesse est donc ici sans influence, conséquence qui, au premier aspect, semble en contradiction manifeste avec ce que nous avons déduit de la première expérience. Les deux résultats, toutefois, ne sont pas inconciliables. Une nouvelle hypothèse peut, ce me semble, les faire concorder. Au reste, chacun va en juger:

«  La vitesse avec laquelle un rayon lumineux traverse un corps donné, dépend exclusivement de la réfringence de ce corps et de la vitesse d’émission du rayon, de la vitesse qu’il avait dans le vide. Le rayon qui arrive à la surface de la couche d’iode à travers l’eau, possède, au point où il rencontre cette surface, une vitesse supérieure à celle qu’avait au même point, le rayon qui se mouvait à traversl’air; mais dans l’intérieur même de la couche, à une profondeur suffisante, les deux rayons ont exactement les mêmes vitesses. Faisons dépendre les phénomènes photogéniques, non d’une action exercée à la surface, mais d’une action naissant dans l’intérieur de la couche, et toute difficulté disparaît. Seulement, chose singulière, nous sommes amenés forcément à établir une distinction essentielle entre l’intérieur et la surface d’une couche dont l’épaisseur est d’une petitesse incroyable.

» En envisageant ainsi les phénomènes photogéniques, comme des exemples d’actions moléculaires susceptibles d’évaluations précises, tout le monde sentira combien il serait intéressant d’intercaler des chiffres dans les raisonnements généraux que je viens de présenter. On atteindra ce but en complétant d’abord les expériences à l’aide desquelles M. Dumas avait commencé à déterminer l’épaisseur de la couche d’iode sur laquelle se forment les images daguerriennes, d’après les pesées comparatives d’une large plaque argentée avant et après son ioduration. On portera ensuite dans l’observation des positions relatives des raies obscures tracées sur la matière impressionnable, toute l’exactitude possible, même en s’aidant s’il le faut du microscope; enfin, au lieu de passer, par un saut brusque, de l’air à l’eau, on comparera les positions relatives des stries produites dans deux milieux légèrement différents en densité ou en réfringence. Dès à présent, dans le système de l’emission,

les conséquences suivantes découlent rigoureusement de la discussion à laquelle je viens de me livrer:

«  Si les effets photogéniques de la lumière solaire résultent exclusivement de l’action de rayons obscurs mêlés aux rayons visibles, marchant comme eux et avec des vitesses du même ordre, les spectres superposés de ces deux espèces de rayons, ont leurs solutions de continuité exactement aux mêmes places;

«  Si les rayons visibles produisent les effets photogéniques en totalité ou en partie, cette propriété est tellement inhérente à leur vitesse, qu’ils la perdent également quand cette vitesse s’accroît et quand elle diminue;

«  Les effets photogéniques de la lumière solaire, soit qu’ils proviennent de rayons visibles ou de rayons invisibles, ne peuvent pas être attribués à une action exercée à la surface de la couche impressionnable: c’est à l’intérieur de la matière qu’on doit chercher le foyer de ce genre d’action.

«  Les conclusions précédentes pourront être étendues quand on connaîtra l’épaisseur de la moindre couche d’iode dans laquelle s’engendrent les phénomènes daguerriens; quand il sera possible de comparer cette épaisseur à la longueur des accès ou à celle des ondes lumineuses. »

 

M. Fizeau a mis sous les yeux de l’Académie des épreuves obtenues avec une planche daguerrienne sur laquelle il avait fait mordre des acides d’après une méthode particulière: ces épreuves sont remarquables par la finesse des détails. La planche est assez creusée pour se prêter à un tirage considérable et, cependant, les blancs n’offrent aucune trace de gris; ils se sont parfaitement conservés.

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