domingo, 26 de abril de 2009

1861, 1 de Janeiro

1861, 1 de Janeiro
Le moniteur scientifique
Journal des Sciences pures et appliquées spécialement consacre aux chimistes et aux manufacturiers
par le dr . Quesneville
paris
chez
M. Quesneville, rédacteur-propriétaire
55, rue de la verrerie
T. III
97º Livraison
Pags. 13, 14, 15
*
REVUE DE PHOTOGRAPHIE
Sommaire. - Services rendus par la photographie. - Reproduction des manuscrits du monastère do Mont-Athos, par M. le comte de Sewastianoff. - Reproduction du manuscrit Sforza, par M. C. Silvy. - Virages alcalins au chlorure d’or. - Formules de MM. Bayard, Maxwell Lyte et l'abbé Laborde. - Mode d'opérer.

Ce serait, à coup sûr, l'une des statistiques les plus intéressantes de notre temps que celle qui se proposerait pour but d'établir dés aujourd'hui le bilan de la photographie. Dans cette intéressante étude, on verrait défiler un nombre déjà considérable d'industries inconnues il y a vingt ans : les opticiens, les constructeurs d'appareils, les ébénistes, les fabricants de cadres, de papiers, de produits chimiques, les marchands d'estampes, et enfin les photographes eux-mêmes assistés de leurs aides, de leurs préparateurs, de leurs employés, viendraient former une phalange nombreuse et serrée, dont tous les membres devraient à la photographie les uns le pain de chaque jour, les autres l'aisance, quelques-uns enfin la fortune. Mais ce qui sera-it plus curieux encore, ce serait de dénombrer, à côté de ces services économiques, ceux que la photographie rend chaque jour aux sciences les plus diverses et même aux beaux-arts.
Ces réflexions, dont chacun comprendra l'opportunité au moment où notre art vient d'entrer dans sa vingt-unième année, nous étaient suggérées, il y a quelques jours, par la vue des admirables reproductions de manuscrits exécutées par M. le comte de Sewastianoff et M. C. Silvy. Parmi les sciences que l'on pourrait appeler de haute distinction, l'archéologie est une de celles qui marchent au premier rang. Il est rare qu'un esprit vulgaire s'intéresse à l'histoire vraie ou légendaire de l'humanité, et c'est à un petit nombre seulement d'esprits supérieurs et distingués que sont réservées les jouissances exquises que cette science procure. D'ailleurs les éléments de travail sont rares et coûteux; le plus souvent même, enfouis dans des bibliothèques privées, ils ne peuvent être mis à la disposition que d'un petit nombre d'adeptes privilégiés. Il appartenait à la photographie de changer cet état de choses, de populariser par ses méthodes si remarquables ces manuscrits rares, précieux, la plupart du temps inconnus même aux archéologues, de mettre enfin à la portée d'un plus grand nombre les moyens de poursuivre des études dont peu de personnes soupçonnent aujourd’hui le puissant intérêt.
Il y a plusieurs années déjà, quelques photographes s'étaient préoccupés de cette question, et plus d'un parmi nous a reproduit non-seulement des tableaux ou des gravures, mais encore des manuscrits, des lettres, etc. Mais ces tentatives n'ont jamais été dues qu'à des efforts isolés, et exécutées le plus souvent dans un simple but de curiosité et pour montrer la puissance des moyens dont notre art dispose. II n'en est pas de même des travaux dont nous parlons en ce moment: exécutés avec persévérance, ils ont une haute portée scientifique et utilitaire.
M. le comte de Sewastianoff s'est voué particulièrement à ce travail avec une ardeur et un courage qu'on ne saurait trop louer, et dont la photographie d'une part, l'archéologie d’une autre, tireront un parti d'autant plus précieux que le succès ne lui a jamais fait défaut jusqu'ici. Le mérite de son œuvre grandit d'ailleurs lorsqu'on envisage dans quelles circonstances et dans quelle localité il lui a été donné de l'exécuter.Au sud de la presqu'ile de Salonique, en face de l'archipel, s'élève, chacun le sait, une haute montagne que désigne le nom célèbre de Mont-Athos. Là, au milieu de forêts de vignobles, s'étendent vingt monastères dans lesquels 3,000 moines grecs se vouent à l'étude et à la culture. Les bibliothèques de ces monastéres sont les plus riches de l'Europe en manuscrits de la plus haute antiquité: les grecs, les romains, et mille autres y figurent en foule; les premiers temps du christianisme surtout y sont représentés par des monuments admirables et introuvables partout ailleurs. M. le comte de Sewastianoff a courageusement entrepris la reproduction de ces monuments: pendant deux années et plus, il s'est enfermé dans ces monastères, et là, voué à l'étude, en tête à tête avec ces manuscrits, il a exécuté une œuvre qui témoigne non-seulement d'une grande habileté photographique, mais encore d'une sûreté de goût et d'une science archéologique que l'on ne saurait trop apprécier.
Le nombre des clichés qu'il vient de rapporter cette année s'élève à trois mille environ, représentant plus de quatre milles pages de texte. Les épreuves positives tirées au, moyen de ces clichés permettent d'apprécier dès à présent ce que sera l'œuvre entière. Les plus intéressantes sont celles où le texte se trouve accompagné de dessins, d'enluminures et même de peintures dont quelques-unes sont fort remarquables. Parmi ces peintures, il en est qui remontent jusqu'au VIe siècle; presque toutes représentent des sujets religieux, et l'on ne peut sans étonnement et sans une vive satisfaction regarder ces curieux spécimens de l'art naïf et pur des premiers siècles de notre ère. A côté des manuscrits, M. le comte de Sewastianoff a reproduit un grand nombre de peintures murales dont l'exécution a présenté de grandes difficultés; il s'est préoccupé également, et avec succès, de la représentation des objets d'art, des instruments du culte, des vases précieux, etc., que les monastères du Mont-Athos possèdent à profusion. Toutes ses épreuves sont d'une exécution parfaite; elles rendent admirablement, les unes le vieux parchemin sur lequel les caractères sont tracés, les autres les couleurs mates et peu épaisses des peintures murales, les autres la richesse et la variété des substances métalliques dont sont formés les vases et instruments précieux des églises. En un mot, un succès complet a couronné les courageux efforts de M. le comte de Sewastianoff.
M. C. Silvy, qui, depuis deux-ans environ, a abandonné Paris pour se fixer à Londres où nos plus riches ladies se disputent l'honneur d'être photographiées par lui, M. C. Silvy, disons-nous, vient d'accomplir avec un égal succès une œuvre moins considérable sans doute, mais cependant fort remarquable aussi. M. le marquis d'Azeglio possède, dans sa riche bibliothèque, un manuscrit des plus curieux: c'est un petit volume de seize pages, connu dans le monde bibliophile sous le nom de manuscrit Sforza. Ce manuscrit ne présente, par son teste, rien de bien intéressant; celui-ci, en effet, se compose uniquement d'une sorte de thème latin, d'amplification de rhétorique donnée comme étude à un jeune enfant de la famille Sforza; mais chaque page de teste est encadrée d'une marge de deux centimètres de largeur environ, et sur laquelle se trouvent reproduites, avec une charmante naïveté, des scènes de bataille au milieu desquelles se détachent, en médaillons, les portraits des principaux membres de l'illustre famille Sforza. Ces dessins, dont la remarquable exécution a toujours fixé l'attention des amateurs, possèdent un haut intérêt historique. Aussi est-ce à ce manuscrit que s'est adressé tout d'abord M. C. Silvy pour commencer l'intéressante série de reproductions qu'il projette et qu'il était impossible de mieux inaugurer. Dire que dans l'exécution de ce travail on reconnaît l'habileté du photographe, dont les portrails cartes de visite ont, à Londres, un si grand succès, dont le goût et le talent ont pu être récemment encore appréciés par son: Premier Bulletin de l'armée d'Italie, que M. Joubert vient de reproduire par le charbon et de publier à Londres, c'est dire que la reproduction a été accomplie avec un succès parfait. Dans le fait même de cette reproduction, il s'est produit un fait extrêmêment curieux sur lequel le Bulletin de la Société photographique de Paris vient d'appeler l'attention. Au bas de la dernière page de ce manuscrit, un commentateur avait ajouté une note écrite en allemand; mais cette note avait jusqu'ici fait le désespoir des bibliophiles. L'encre, en effet, avait jauni avec le temps, et était devenue complétement illisible. Cependant la photographie est parvenue à la lire. Ce résultat est facile à comprendre; en effet tous les photographes savent parfaitementqu'un objet jaune agit sur la couche sensible exactement comme un objet noir; que le premier est aussi antiphotogénique que le second, et que par suite l'objet jaune doit ensuite être reproduit sur le positif exactement comme s'il avait été noir. C'est ce qui a eu lieu en réalité, et, grâce à la reproduction photographique, on peut aujourd'hui lire aisément, au bas du manuscrit Sforza, la note qui pendant si longtemps est restée illisible.
- Plusieurs de nos abonnés nous ont fait l'honneur de nous écrire pour nous demander quelques détails sur un nouveau procédé de virage au chlorure d'or, dont M. l'abbé Laborde est l'auteur et dont nous avons dit quelques mots dans notre dernière Revue. Comme la question du virage des épreuves positives est l'une des plus intéressantes en photographie, nous nous empressons de répondre au désir qui nous a été exprimé. Nous profiterons même de cette occasion pour envisager la question à un point de vue un peu plus général.
Lorsqu'on examine attentivement la plupart des épreuves positives qui se trouvent dans le commerce, on reconnaît que celles-ci sont revêtues de colorations particulières et différentes, mais se rapprochant toutes de deux tons bien distincts, le rouge et le noir. De ces deux tons, le dernier est celui que l'on préfère en général; on l'obtenait aisément autrefois au moyen des hyposulfites vieux, mêlés au nitrate d'argent, ou acidulés par l'acide acétique; mais depuis que les recherches chimiques de M. Hardwich en Angleterre, de MM. Davanne et Girard en France, ont fait proscrire d'une manière absolue ces procédés de virage qui amènent la sulfuration et l'altération des épreuves, les photographes se sont exclusivement attachés à l'emploi des sels d'or. Le sel de MM. Fordos et Gelis est fréquemment employé, mais beaucoup, par économie, préfèrent se servir du chlorure d'or du commerce. Or, celui-ci présente, à notre avis du moins, quelques inconvénients: mélangé suivant les formules de M. Legray, etc., avec une solution acide, il produit, du moins entre les mains de la plupart des photographes, des tons rouges et violacés qui sont loin de plaire à tout le monde. Beaucoup, et nous sommes du nombre, préfèrent les beaux tons noirs et veloutés que fournissaient autrefois les hyposulfites acides, et que peuvent encore fournir aujourd'hui les procédés de virage désignés sous le nom d'alcalins. Ces procédés sont d'ailleurs d'une exécution aussi facile que ceux basés sur l'emploi du chlorure d'or acide; ils sont de beaucoup supérieurs à ces derniers, et nous croyons devoir les recommander spécialement à l'attention des photographes.
Trois formules à notre connaissance donnent d'excellents résultats; nous les consignons ici, elles sort dues à MM. Bayard, Mawell Lyte et enfin à l'abbé Laborde. D'autres encore ont été proposées, mais elles offrent avec celles-ci une grande analogie, et paraissent a priori devoir fournir des résultats semblables. D'ailleurs, nous ne croyons pas qu'il soit avantageux de multiplier les formules à l'infini; une bonne suffit, et le lecteur pourra choisir en toute confiance parmi les trois formules suivantes:

Formule de M. Bayard.

Eau ……………………………….1 litre.
Chlorure d'or ……………………..1 gramme.
Chlorhydrate d'ammoniaque ……..25 grammes.

Formute de M. Maxwuell Lyte:

Eau ……………………………….1 litre.
Chlorure d'or ……………………..1 gramme.
Phosphate de soude ………………20 grammes.

Formule de M. l'abbé Laborde.

Eau ……………………………….1 litre.
Chlorure d'or ……………………..1 gramme.
Acétate de soude …………………30 grammes.

Quel que soit celui de ces trois bains auquel on s'arrête, l'épreuve, retirée du châssis et tirée un peu noir, est passée dans deux ou trois eaux destinées à enlever le nitrate en excès; au besoin même, on termine le lavage par un bain de sel à 5 ou 10 pour 100. Cela fait, l'épreuve est immergée dans le bain d'or, sa face en dessus et bien couverte de liquide; inimédiatement l'action se produit, l'épreuve vire en parcourant tous les tons du rouge au bleu foncé. Si le bain est neuf, 20 à 30 secondes suffisent pour atteindre le but désiré; s'il est affaibli, ce qui a lieu après qu'on y a passé une dixaine d'épreuves, 2 ou 3 minutes sont nécessaires. Il est préférable alors d'ajouter au bain un gramme de chlorure d'or, pour lui rendre son énergie. Dans tous les cas, on arrête l'action aussitôt que l'épreuve paraît avoir revêtu, entre le rouge et le bleu, le ton que l'on désire. On lave ensuite à l'eau, puis on fixe dans un bain d'hyposulfite. Neuf à 20 pour 100, comme d'habitude. Les épreuves obtenues de cette façon et dont l'habitude apprend bien vite la préparation, sont toujours belles et inaltérables.
Th. Bemfield.

Sem comentários:

Enviar um comentário